Si l’on regarde une carte, on est frappé par le fait qu’entre la frontière espagnole et la ville de Marseille, une seule île se détache de notre littoral : Brescou, au large du cap d’Agde.
Ce petit îlot d’un demi hectare, situé à un kilomètre de la côte et d’origine volcanique est surmonté d’un phare [2 éclats blancs, 6 secondes, portée 13 milles nautiques] qui signale aux navires l’un des rares escarpements rocheux de notre côte. Le fort, dont la première version date du 16ème siècle occupe la majeure partie de l’îlot. Malheureusement, son état n’autorise pas les visites pour le moment, et de ce fait, les navettes vers Brescou sont suspendues. Pour débarquer sur l’île, il faut donc un bateau.
Si les canots à moteur peuvent aborder le long du petit quai tout en pierres noires, les voiliers doivent s’amarrer à l’un des coffres mis à disposition. Ensuite, c’est en annexe qu’il faut se rendre sur l’île.
On débarque alors sur la petite plage de gravier située devant l’entrée du fort. Nous n’irons pas plus loin, l’entrée étant fermée par sécurité.
Bâtis avec cette roche noire volcanique caractéristique d’Agde, les hauts murs de l’ouvrage de défense se dressent devant le visiteur. Près de l’entrée, un vieux treuil finit de rouiller. Ça et là, des structures de bois et métal consolident des parties de l’édifice qui menacent de s’effondrer. Il faut reconnaitre qu’ici, le climat est plutôt agressif : tempêtes du large qui fragilisent les murs, air marin chargé de sel et d’humidité qui ronge les joints, toutes les conditions sont réunies pour que l’ouvrage s’abime un peu plus chaque année.
Les premiers travaux de rénovations commencèrent en 1998. Le fort (inscrit à l’Inventaire supplémentaire des Monuments Historiques) fut cédé par l’état à la ville en 2009. Créée en 2012, l’association Les Amis du Fort de Brescou s’attache depuis à récolter des fonds pour poursuivre les travaux de rénovation. Retenu en 2019 par le loto du patrimoine, l’ouvrage devrait bénéficier d’un coup de pouce financier significatif.
L’histoire du fort commence en 1586 lorsque débute sa construction par le vicomte de Joyeuse, qui craignait alors une attaque des espagnols. Ses défenses sont consolidées au début du siècle suivant. Mais en 1632, il est occupé par les troupes du duc de Montmorency qui s’oppose à Richelieu. Après la capture du duc et sa décapitation, Louis XIV ordonne la destruction de l’ouvrage. Mais le cardinal qui s’y oppose finit par convaincre le roi d’y renoncer.
Le grand projet de Richelieu est alors d’établir un port militaire majeur sur le site. Il fait édifier une jetée qui doit relier l’îlot au continent. Mais à la mort du cardinal, cet ouvrage dont la construction n’est pas terminée est abandonné. Il en reste aujourd’hui un môle puissant à l’abri duquel le port de plaisance du Cap d’Agde a été creusé.
L’ouvrage militaire servit aussi de prison d’état de 1680 à 1852 dans laquelle furent enfermés des criminels de droit commun ainsi que des huguenots cévenols lors des guerres de religion. On y trouva par la suite aussi bien des prisonniers maures après la prise de la smala d’Abdel-Kader que des opposants au coup d’état du 2 décembre 1851. Il fut ensuite déclassé, puis attribué aux Ponts et Chaussées.
En parallèle à ses fonctions militaires et pénitentiaires, un premier phare y fut installé à la fin du 16ème siècle. Il s’agissait d’un simple fanal allumé tous les soirs au sommet d’une tour ; un vrai phare fut construit en 1836 sur les restes d’une autre tour. Toujours en fonctionnement, il s’élève à vingt-deux mètres au-dessus de l’eau. Un couple de gardiens y vécut sur place jusqu’au milieu des années 60, date à laquelle il fut automatisé. En ces années d’avant la Mission Racine, les agathois et les quelques vacanciers qui logeaient dans les rares maisons bâties sur la falaise se rendaient sur Brescou en barque. On y faisait alors des moules et des poulpes en quantité.
Aujourd’hui et depuis 2020, l’îlot est au cœur d’une Aire Marine Protégée de 310 ha. Ses objectifs sont évidemment la protection des habitats naturels et la biodiversité. Au sud de Brescou, la réserve marine du Roc de Brescou interdit strictement les activités de pêche maritime, en surface ou en plongée, ainsi que le mouillage et le dragage.
Les bouées installées près de Brescou permettent aux bateaux de s’amarrer sans utiliser l’ancre et sa chaine, destructrice des herbiers de posidonies. Enfin, un sentier sous-marin implanté au pied de la falaise permet si l’on s’équipe d’un simple masque de découvrir en période estivale les richesses des fonds marins.
Le vent du sud s’est levé, engendrant un clapot inconfortable. Il est temps de reprendre l’annexe et de retourner au bateau qui tire sur son coffre. Ramant dos à l’avancée, je regarde le fort qui s’éloigne doucement, perché sur son île, la seule de notre littoral depuis Marseille jusqu’à Cerbère.
Mon cher Hervé, encore une fois tu me transporte vers un endroit que j’ai toujours rêvé de visiter.
Merci et encore félicitations pour ton formidable « travail » pour notre région.
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Merci Charles… Si tu as l’occasion, vas-y faire un tour…
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J’ai eu la chance de le visiter plusieurs fois et Hervé apporte toujours sa pierre à l’édifice du savoir ! Bravo et Merci
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Merci pour ce commentaire. Et c’est toujours un plaisir pour moi de faire ces découvertes et de les partager
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